Il y aura trente ans en Mai, je me suis assise dans mon salon, à Sea Cliff, Long Island, pour rechercher de nouvelles idées d'histoire. Et c'est là que me sont apparus les dragons, leurs partenaires symbiotiques et Pern. J'ai y passé toute ma journée, jusqu'à ce que les enfants rentrent de l'école. J'ai définis les paramètres de l'histoire, aussi bien que le monde qui avait besoin des capacités spéciales des dragons que j'avais conçus comme le système de défense aérien renouvelable de Pern. Je vous l'avoue, j'ai triché un peu : j'ai utilisé une planète de type terrestre.

En fait, pourquoi pas? Carl Sagan a dit aux écrivains de Science Fiction américains, lors de leur banquet Nebula annuel, qu'il y avait sans doute des milliers de planètes de type terrestre dans l'Univers. C'était donc dans les limites de la réalité. Ce qui n'y était pas, bien que je l'ai appris plus tard du Dr. Jack Cohen, c'était le développement d'espèces humanoides à partir d'une racine primordiale commune. Mais je n'avais pas besoin d'humains. J'avais besoin d'idées.

La première histoire, "Weyr Search", était composé d'environ 26000 mots. John Campbell, qui l'a acheté pour Analog Magazine, m'a demandé d'enlever quelques 6000 mots de façon à ce qu'il puisse paraître en une seule fois. Je l'ai fait. Et je les ai remis plus tard quand j'ai écrit la nouvelle. Non pas que je réalisais à ce moment là que j'allais écrire une nouvelle... ou que j'allais passer une bonne partie des trente années suivantes à écrire plus de deux millions de mots sur ce même thème. Pas trop mal pour une pensée d'un jour, non?

Alors que je me sais créatrice de Pern et de toute ses merveilles, il y a des gens pour penser que je parle de Pern seulement parce que c'est là et que ça a besoin d'un porte-parole. Et j'ai été choisie. Quelle que soit la vérité, ça a été une formidable expérience. J'en sais bien plus sur Pern que ce que j'ai eu le temps, ou l'occasion, de coucher sur le papier en dépit de quatorze nouvelles et de trois livres de références. Et je me sens trés à l'aise pour retourner sur Pern et ajouter d'autres aventures quand il m'apparaît qu'un évènement a besoin d'être raconté. Avec plus de 2500 ans (révolutions!) d'histoire où fouiller, j'ai largement de quoi choisir.

Je me dois d'être impitoyable avec ceux qui veulent écrire, ou jouer dans Pern. Bien que je permette une juste quantité de variations (il y a plein de directions qui ne perturbent pas mon sens de ce qui est possible, ou permit sur Pern), quelques fois l'imagination de ceux qui sont fascinés par Pern dépasse les limites du sens commun qui dicte ce qui peut, ou ne peut pas arriver aux Weyrs, Forts, Ateliers... et, bien sûr, aux dragons. J'ai donc eu occasionellement à "policer" des jeux online, et supprimer certaines idées des MOOs, MUSHs, et IPGs. J'ai du aussi repousser systématiquement des offres d'idées pour mes histoires. Mon travail doit venir de moi-même, et je ne manque pas d'idées de mon cru à explorer.

Evidemment, je peux certainement comprendre cette sorte de dévotion qui anime les lecteurs qui veulent partager la création et l'expérience d'un monde de fiction. Quand j'ai eu quatorze ans, j'ai commencé à aller à Islandia chaque fois que les choses allaient mal pour moi sur Terre. Le "Dystopia" de Austin Tappan Wright était tellement réelle que je l'ai recherchée en vain sur le globe. Et j'ai même désespéremment cru que les reconnaissances aériennes durant la IIème guerre mondiale permettraient sûrement de découvrir son emplacement secret. Donc je comprend ce que c'est que de découvrir un monde imaginaire qui emprisonne complètement votre esprit et votre coeur. Et au bout du compte, si quelqu'un est responsable de la création Pern, c'est Mr. Wright!

Jusqu'à ce jour où je me suis assise dans mon salon, je n'avais jamais révé que je serais capable de créer cette sorte de magie moi-même. Mais comme je parvenais à concevoir Pern, il a commencé à avoir sa vie propre, devenant de plus en plus réel à mes yeux au fur et à mesure qu'il se développait.

L'astuce pour créer un monde que tout le monde souhaite voir exister est d'y croire soi-même. Mais de toute façon, c'est bien ce qui compose toute la Science Fiction, n'est-ce pas?